3 questions à Mario-Pierre STASI, Avocat au Barreau de Paris 

01/12/2022
Interview accordée à Dominique LAULHE-DESAUW, par Mario-Pierre STASI qui interviendra à l'occasion des Assises juridiques de l'alimentation et des Filières Agroalimentaires, jeudi 8 décembre.

1) Parlez-nous des principales sanctions pénales en sécurité des aliments :
 
Les principales sanctions pénales en la matière sont d’ordre pécuniaires dès lors qu’il y a eu tromperie :
- soit sur la nature, la composition ;
- soit sur la quantité, l’identité ;
- soit sur l’aptitude à l’emploi, les risques inhérents, les contrôles effectués, les précautions à prendre.
 
La sanction pénale revêt, dans la majorité des cas, la forme d’une amende dont le montant peut aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires de la personne morale ou de la personne physique suspectée de ce délit de tromperie.
Celle-ci peut aller jusqu’à la mise en examen et la création d’un fond d’indemnisation en prévision du paiement aux victimes des dommages et intérêts.
Des peines d’emprisonnement, avec ou sans sursis, peuvent être prononcées pour les manquements les plus graves à la sécurité alimentaire, ayant pour résultat de mettre en danger la santé humaine.
Enfin, la sanction pénale s’accompagne souvent d’une forte médiatisation (cf Affaire Buitoni).
 

2) Racontez-nous une procédure pénale type :
 
1- Ouverture d’une enquête auprès du Pôle de Santé Publique (2 pôles en France : Paris et Marseille)
2- Phase instruction (2 à 3 juges désignés à cet effet selon l’importance du dossier)

 A noter :
- Il s’agit d’une procédure caractérisée par la technicité de la matière, de la réglementation applicable, par le nombre très important des parties concernées
- Cette procédure bénéficie de moyens spécifiques (spécialisation et travail en équipe des juges d’instruction, assistants spécialisés mis à disposition (vétérinaires-inspecteurs de santé publique, médecins-inspecteurs, pharmaciens-inspecteurs )
- Enfin, celle-ci est dotée d’une méthodologie adaptée et d’un traitement individualisé des plaintes 
 
3) Quid des textes européens en la matière ? Parlez-nous du règlement 2017/625 qui établit ces règles :
 
Le règlement 2017/625 fixe les règles communes pour les contrôles officiels de l’UE en matière de sécurité alimentaire.
Il s’applique aux contrôlés réalisés dans toutes les entreprises du secteur de l’alimentation humaine et animale (des producteurs primaires et éleveurs aux grossistes et traiteurs).
 
Ce règlement, entré en vigueur le 14 décembre 2019, donne des précisions sur les obligations en matière de contrôles frontaliers de l’UE pour les animaux et les marchandises, surtout en provenance des pays tiers. Il fixe également un contrôle pour les marchandises et aliments commandés par Internet.
Ces dispositions aboutissent au renforcement du rôle des Douanes en matière de sécurité alimentaire.
 
Est consacrée, dans ce règlement, une approche plus flexible des contrôles officiels, centrée sur le risque. Un examen des risques des différents secteurs (filière laitière, filière « viande ») est fait pour adapter la fréquence des contrôles.
 
Le texte consacre également un renforcement de la communication entre les autorités judiciaires et policières des Etats membres en matière de sécurité alimentaire. Les autorités compétentes doivent pouvoir fournir des informations détaillées  sur les éventuels manquements aux règles de la sécurité alimentaire, améliorant ainsi la traçabilité des marchandises et denrées alimentaires.
 
En mettant en œuvre cette mesure, l’Union Européenne tire les enseignements des affaires emblématiques pour la sécurité sanitaire, dont notamment celle de la vache folle. Une meilleure communication entre Etats membres est indispensable vues les spécificités des crises de sécurité alimentaire, très souvent transnationales.
 
Une autre disposition-clé du règlement est la prise en compte, dans la vérification de la conformité des animaux et des produits d’origine animale importés à la réglementation, de l’utilisation de médicaments vétérinaires. La prise en compte du bien-être animal reste une préoccupation constante du règlement. Plusieurs mesures sont introduites pour améliorer leurs  conditions de transport, d’élevage et d’abattage.
 
Finalement, le règlement fixe des exigences importantes en matière de transparence des contrôles officiels. Les autorités nationales sont tenues de publier des rapports annuels de leur activité, ainsi que des plans pluriannuels de contrôle. Cette transparence concerne aussi le volet financier, avec une fixation de règles communes de redevances pour les contrôles officiels.  
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